“Filles-garçons, une mĂȘme Ă©ducation ?”, supplĂ©ment pour les parents du magazine Pomme d’Api, mars 2018. Texte : Anne Bideault. Illustrations : SĂ©verine Assous.

Filles-garçons : mĂȘme Ă©ducation ?

ÉlĂšve-t-on de la mĂȘme maniĂšre une fille et un garçon ? Cette question touche toute la sociĂ©tĂ©, mais aussi nos comportements inconscients et nos automatismes
 quand les stĂ©rĂ©otypes sont souvent prĂ©sents dĂšs le berceau. Le magazine Pomme d’Api propose quelques pistes de rĂ©flexion dans son supplĂ©ment pour les parents du mois de mars 2018.

Filles-garçons, une Ă©ducation ni rose ni bleue ?

“Filles-garçons, mĂȘme Ă©ducation ?”, supplĂ©ment pour les parents du magazine Pomme d’Api, mars 2018. Texte : Anne Bideault. Illustrations : SĂ©verine Assous.C’est le bol du petit dĂ©jeuner qui a fait office de dĂ©clic chez Lise, mĂšre de deux garçons de 5 ans et 2 ans et demi. “Quand mon fils avait prĂšs de 4 ans, je me suis rendu compte que je ne lui avais jamais demandĂ© de dĂ©barrasser son bol. Je suis persuadĂ©e que si j’avais eu une fille, je l’aurais exigĂ© beaucoup plus tĂŽt.” Lise est enseignante, et mĂšne, au sein de son collĂšge, un projet de sensibilisation des Ă©lĂšves au sexisme ordinaire. C’est dire si elle est vigilante !

Mais mĂȘme si l’on a une pensĂ©e critique sur les stĂ©rĂ©otypes, “nous nous comportons diffĂ©remment avec les hommes et les femmes ; et ce, dĂšs leur naissance”, explique Patricia Mercader, psychologue spĂ©cialisĂ©e dans les questions de genre. De nombreuses expĂ©riences l’ont prouvĂ©. Parmi elles, la suivante : un mĂȘme nourrisson est prĂ©sentĂ© Ă  des adultes, une fois vĂȘtu comme un garçon, une fois comme une fille. Selon le genre attribuĂ© au bĂ©bĂ©, les descriptions qu’ils en font divergent : plus grand, plus lourd, plus actif, plus affirmĂ©, dans le premier cas, plus petit, plus lĂ©ger, plus gracieux, plus faible, dans le second.

“Filles-garçons, mĂȘme Ă©ducation ?”, supplĂ©ment pour les parents du magazine Pomme d’Api, mars 2018. Texte : Anne Bideault. Illustrations : SĂ©verine Assous.
De façon inconsciente et automatique, par toutes les interactions quotidiennes, les petits garçons sont encouragĂ©s Ă  la virilitĂ©, et les petites filles Ă  la fĂ©minitĂ©, dans leur façon de penser, de ressentir, de bouger, d’évoluer dans l’espace. “Dans mon entourage, s’indigne Lise, je constate qu’on est plus exigeant vis-Ă -vis d’une petite fille pour la politesse (“Dis bonjour”) et pour la propretĂ© (“Tu vas te salir”), alors qu’on accepte que mes garçons traĂźnent par terre ou refusent de dire bonjour. Filles ou garçons, ce sont avant tout des enfants !”

AngĂ©lique se souvient des rĂ©flexions qu’elle a essuyĂ©es quand elle a offert Ă  son fils de 3 ans la cuisiniĂšre miniature avec laquelle il joue tant. Et puis aussi de tous ces clichĂ©s : “Les petits garçons, ça ne pleure pas, c’est courageux !” Autant de rĂ©flexes qui mĂ©nagent Ă  chaque sexe une place diffĂ©rente. Des Ă©tudes ont montrĂ©, par exemple, que nous freinons la prise d’initiatives, l’action, le goĂ»t pour les sciences, chez les filles, et l’attention Ă  autrui, l’expression des Ă©motions, chez les garçons.

Une norme à découvrir

Dans les familles oĂč le distingo fille/garçon ne se manifeste pas dans le choix des objets ou des vĂȘtements, l’entrĂ©e Ă  la maternelle marque souvent le moment oĂč l’enfant se charge lui-mĂȘme d’affirmer son appartenance Ă  un sexe ou l’autre.

“Avec la petite section est arrivĂ©e la passion pour le rose, et les phrases du type «Ça, c’est un truc de garçon/de fille»”, s’étonne Mathilde, mĂšre de deux enfants. “Normal, dĂ©crypte Patricia Mercader, Ă  l’école, les enfants sont plongĂ©s dans la sociĂ©tĂ© telle qu’elle est et telle que l’interprĂštent des tout-petits, c’est-Ă -dire de façon rigide.” À cet Ăąge-lĂ , ils utilisent pour penser les catĂ©gories que leur propose l’environnement dans lequel ils grandissent. Plus ces catĂ©gories sont impĂ©ratives (“Une fille, c’est comme ceci, un garçon se comporte comme cela”
), moins ils peuvent envisager des nuances ou des exceptions : un garçon aux cheveux longs ? Une fille dĂ©guisĂ©e en Dark Vador ? Pas possible ! La plupart se refuseront Ă  eux-mĂȘmes la libertĂ© de s’emparer des attributs de l’autre genre. VoilĂ  pourquoi le T-shirt violet, jusqu’alors apprĂ©ciĂ©, ne l’est plus : “Ça fait fille.” Sans compter que les attributs fĂ©minins sont moins valorisĂ©s que les attributs masculins. On accepte plus aisĂ©ment qu’une fille se passionne pour le foot qu’un garçon mette des barrettes.

Transgresser la norme suppose de l’aplomb de la part de l’enfant, car cela suscite souvent remarques, moqueries, voire humiliations. Refuser radicalement tout stĂ©rĂ©otype n’est d’ailleurs pas une bonne stratĂ©gie : rabrouer toute aspiration Ă  la fĂ©minitĂ© chez une fille ou tout comportement viril chez un garçon serait tout aussi enfermant.

“Filles-garçons, mĂȘme Ă©ducation ?”, supplĂ©ment pour les parents du magazine Pomme d’Api, mars 2018. Texte : Anne Bideault. Illustrations : SĂ©verine Assous.

Elle est musclée, il est mignon

“Filles-garçons, mĂȘme Ă©ducation ?”, supplĂ©ment pour les parents du magazine Pomme d’Api, mars 2018. Texte : Anne Bideault. Illustrations : SĂ©verine Assous.“Je n’ai pas fait de commentaires quand mon fils a choisi une trousse avec des fleurs violettes pour sa rentrĂ©e en CP, se souvient HĂ©lĂšne. Et je le respecte aussi quand il est fier de me montrer ses muscles.”

“Je me suis rendu compte que je rĂ©pĂ©tais Ă  ma fille ‘Qu’est-ce que tu es mignonne !’ quel que soit ce qu’elle faisait, relate Sylvie. Je m’efforce maintenant d’ĂȘtre plus prĂ©cise :  ‘Quelle force !’ ou ‘Comme tu es agile !’”

AngĂ©lique refuse de laisser penser Ă  ses fils que les garçons ne connaissent ni la peur, ni la tristesse. “Ce qui importe, souligne Patricia Mercader, c’est de leur donner une marge de manƓuvre. Si les pleurs d’un petit garçon sont toujours sanctionnĂ©s du cliché : “Un garçon, c’est courageux, ça ne pleure pas !”, si une petite fille casse-cou est traitĂ©e de “garçon manquĂ©â€,  ça ne les aide pas Ă  bien se dĂ©velopper, car cela les force Ă  s’adapter Ă  une place dans le monde beaucoup trop Ă©troite.”

Pour se construire comme garçons ou filles, les enfants ont besoin d’un cadre solide (il y a des garçons et des filles, ils ont des corps diffĂ©rents), mais suffisamment souple pour pouvoir exprimer leur individualitĂ©. Et pouvoir vivre leurs aspirations sans jugement : je suis une fille, je n’aime pas le rose, j’aime courir dehors et escalader les arbres. Je suis un garçon, j’aime jouer tranquillement et je dĂ©teste les ballons.

Élargir l’horizon des possibles

Telle petite fille voulait ĂȘtre “chevaliĂšre” ou “pompiĂšre”, tel petit garçon “maman” ou “maĂźtresse”. N’est-il pas dommage de couper court Ă  ces rĂȘves ? En 2014, un rapport du gouvernement soulignait que seuls 17 % des mĂ©tiers sont mixtes. Pourquoi envisage-t-on si difficilement qu’un garçon puisse devenir enseignant en maternelle (ils ne sont que 7 %) ou qu’une femme devienne pompier professionnel ou mĂ©canicien auto ?

Dur, dur, d’échapper Ă  ces stĂ©rĂ©otypes de partage des rĂŽles dans la sociĂ©tĂ©. Et cela jusqu’au sein de la famille, comme le constate Sylvie : “Je suis assez fĂ©ministe et mon compagnon prend largement sa part Ă  la maison. J’avoue que je n’étais pas fiĂšre quand ma fille m’a fait remarquer que je me tournais toujours vers son pĂšre quand il fallait tondre le gazon ou sortir la visseuse !” À l’inverse, reconnaĂźt Bertrand : “J’ai longtemps dit que “j’aidais” ma femme Ă  la maison, comme s’il Ă©tait Ă©vident que les tĂąches domestiques lui incombaient. Or, nous travaillons tous les deux
”
Alors, mĂȘme si la majoritĂ© de ce que nous transmettons nous Ă©chappe, cela vaut le coup de rĂ©flĂ©chir un instant aux modĂšles que nous proposons et aux discours que nous tenons : “Ce qui me semble fondamental, conclut HĂ©lĂšne, c’est que mes fils respectent les filles et ne se sentent pas supĂ©rieurs.” Et que les filles ne se sentent pas “infĂ©rieures” ou ayant moins de droits et de possibilitĂ©s. Et qu’une fois adultes, les uns et les unes se retrouvent tous Ă©gaux devant – entre autres choses – le panier de linge sale et la machine Ă  laver !

“Filles-garçons, mĂȘme Ă©ducation ?”, supplĂ©ment pour les parents du magazine Pomme d’Api, mars 2018. Texte : Anne Bideault. Illustrations : SĂ©verine Assous.

Garçons et filles : des cerveaux différents ?

“Filles-garçons, mĂȘme Ă©ducation ?”, supplĂ©ment pour les parents du magazine Pomme d’Api, mars 2018. Texte : Anne Bideault. Illustrations : SĂ©verine Assous.Le cerveau humain ne prĂ©sente pas de diffĂ©rences cognitives entre hommes et femmes. Intelligence, mĂ©moire, raisonnement, attention
, garçons et filles ont les mĂȘmes aptitudes. Si certains stĂ©rĂ©otypes ont la vie dure, ce n’est pas parce que les cerveaux des garçons et des filles sont diffĂ©rents, mais parce qu’ils ont Ă©tĂ© diffĂ©remment stimulĂ©s. À la naissance, 90 % des connexions neuronales ne sont pas faites. Le cerveau se façonne selon les expĂ©riences et les interactions. Les normes sociales, l’environnement, les expĂ©riences
 vont forger les goĂ»ts et les aptitudes des individus. Aussi, si l’on entend parfois que les femmes ne sont pas faites pour les sciences, c’est justement parce qu’elles n’y sont pas toujours encouragĂ©es ou formĂ©es. Leur cerveau se focalise sur d’autres aptitudes et cela modifie alors sa structure.

Des albums ni roses ni bleus

Pour les enfants

  • “La princesse, le loup, le chevalier et le dragon”
    C’est l’histoire d’une princesse qui aime la bagarre. Et d’un chevalier qui aime aussi la bagarre. Ils se croisent, et rencontrent un loup et un dragon
 Un petit album au ton trĂšs enlevĂ© et trĂšs drĂŽle, jusqu’au bout. Parce qu’on n’est jamais princesse ou chevalier jusqu’au bout des ongles ! À partir de 4 ans. Jean Leroy, BĂ©atrice Rodriguez, Actes Sud junior, 12,80 €.
  • “Marre du rose”
    Une petite fille en a assez d’ĂȘtre enfermĂ©e dans les goĂ»ts qui ne sont pas les siens. À partir de 5 ans. Nathalie Hense, Ilya Green, Albin Michel Jeunesse, Ă©dition poche, 5,50 €.
  • “Nils, Barbie et le problĂšme du pistolet”
    Nils rĂȘve d’avoir une poupĂ©e Barbie, mais son pĂšre pense lui offrir un pistolet en plastique. Une inversion des clichĂ©s pas “moralo”, servie par des dialogues justes et drĂŽles. À partir de 3 ans. Kari Tinnen, Mari Kanstad Johnsen, Ă©ditions Albin Michel Jeunesse, 14,50 €.

Pour les adultes

  • “ChĂšre Ijeawele, ou un manifeste pour une Ă©ducation fĂ©ministe”
    “Parce que tu es une fille” ne sera jamais une bonne raison pour quoi que ce soit. Jamais. En quinze “suggestions”, dans un style simple et plein d’humour, la romanciĂšre nigĂ©riane rĂ©pond Ă  une jeune mĂšre qui lui demande “comment donner une Ă©ducation fĂ©ministe” Ă  sa fille. À lire par tous, hommes ou femmes, ne serait-ce que pour s’interroger sur l’éducation qu’on a soi-mĂȘme reçue. Chimamanda Ngozi Adichie, Gallimard, 8,50 €.
“Filles-garçons, mĂȘme Ă©ducation ?”, supplĂ©ment pour les parents du magazine Pomme d’Api, n°625, mars 2018. Texte : Anne Bideault. Illustrations : SĂ©verine Assous.

Couverture de Pomme d'Api et supplĂ©ment pour les parents, mars 2018 : “Filles-garçons, mĂȘme Ă©ducation ?” Texte : Anne Bideault. Illustrations : SĂ©verine Assous.

Le SamThéùtre de SamSam et ses marionnettes à doigts

Fabrique tes SamThéùtres

Attention Mesdames et Messieurs, dans un instant, le spectacle va commencer !

Samsam.fr t’offre le SamThéùtre et des marionnettes Ă  doigts. Tu pourras inventer des histoires cosmiques et jouer devant tes amis tes propres piĂšces de théùtre. (suite
)

Le numĂ©ro 4 de “Ma maison Montessori” est sorti !

Montessori Ă  la maison ?

À l’occasion de la sortie du numĂ©ro 4 de Ma Maison Montessori, nous partageons une entrevue avec Charlotte Poussin, Ă©ducatrice Montessori et auteure, sur cette pĂ©dagogie de plus en plus populaire. 

(suite
)

“Dors, je le veux !”, supplĂ©ment pour les parents, Pomme d'Api n°624, fĂ©vrier 2018. Texte : JosĂ©phine Lebard, illustrations : Jean-Louis Cornalba.

Sommeil des 3-6 ans : que faire quand dormir tourne au cauchemar ?

Moment trĂšs important pour les tout-petits, la sieste diminue, puis disparaĂźt, entre 3 et 6 ans. Cette modification du rythme du sommeil perturbe, avec plus ou moins d’intensitĂ©, les nuits des enfants
 et celles de leurs parents. Pour mieux comprendre ce qui se passe, et trouver une solution pour que petits et grands dorment suffisamment, Pomme d’Api fait le point avec deux mĂ©decins.

La fin de la sieste

Claire, maman de Jules entrĂ© en moyenne section, s’inquiĂšte : avec la sieste qui diminue, son fils Jules va-t-il avoir son compte de sommeil ? Nadia, elle, se demande si, avec huit heures par nuit, Selim (6 ans) a suffisamment dormi. Quant Ă  Julien, il craque lĂ©gĂšrement : chaque soir, entre 20 heures et 22 heures, Lucie (4 ans) multiplie les allers-retours dans le salon au rythme de la mĂȘme chanson : “J’ai pas sommeil !”

“Dors, je le veux !”, supplĂ©ment pour les parents, Pomme d'Api n°624, fĂ©vrier 2018. Texte : JosĂ©phine Lebard, illustrations : Jean-Louis Cornalba.Le sommeil de notre enfant, entre 3 et 6 ans, demeure toujours un enjeu. À juste titre : “DĂšs qu’il est diminuĂ©, le sommeil joue sur l’humeur, le comportement et l’apprentissage”, rappelle le docteur Marie-JosĂšphe Challamel, pĂ©diatre spĂ©cialiste du sommeil, et auteure, avec Marie Thirion, de “Le sommeil, le rĂȘve et l’enfant” (Albin Michel). Or, le passage 3-6 ans marque un cap majeur : c’est gĂ©nĂ©ralement le moment oĂč la sieste tend Ă  disparaĂźtre.

“Prenons le cas d’un enfant de 3 ans qui dort dix heures et fait deux heures de sieste, explique le docteur Rosa JovĂ©, pĂ©dopsychiatre et auteure de “Dormir sans larmes” (Les ArĂšnes). Une fois la sieste abandonnĂ©e, l’enfant dormira environ onze heures la nuit.”
La fin de la sieste peut provoquer temporairement l’enchaĂźnement, la nuit, de deux cycles de sommeil lent, souligne Ă©galement la spĂ©cialiste. Lesquels peuvent favoriser l’apparition de quelques troubles : terreurs nocturnes, Ă©nurĂ©sie, somnambulisme, qui disparaissent une fois l’étape franchie.

Mais on peut ĂȘtre rentrĂ© chez “les moyens” et avoir encore besoin d’une vraie sieste le week-end. Pour ce faire, il nous faut rester Ă  l’écoute de nos petits : “Pour voir si le sommeil diurne s’impose encore, on peut observer notre enfant vers 17-18 heures. Si, Ă  ce moment de la journĂ©e, on le sent agressif, capricieux ou particuliĂšrement agitĂ©, alors c’est que la sieste est encore nĂ©cessaire”, estime Marie-JosĂšphe Challamel.

Patience


La pĂ©riode 3-6 ans coĂŻncide Ă©galement avec la phase des premiers apprentissages et de la consolidation du langage parlĂ©. L’enfant s’exprime mieux
 et donc logiquement communique mieux sur ses angoisses, ses craintes, notamment au moment d’aller au lit. À nous alors de nous transformer en nĂ©gociateur de l’ONU pour obtenir du petit qu’il aille se coucher, qu’il reste dans sa chambre
 quand ce ne sont pas les deux Ă  la fois.

“Dors, je le veux !”, supplĂ©ment pour les parents, Pomme d'Api n°624, fĂ©vrier 2018. Texte : JosĂ©phine Lebard, illustrations : Jean-Louis Cornalba.Certes, on peut trouver des solutions pour venir Ă  bout de ces petits soucis (lire plus bas), mais pour Rosa JovĂ©, il convient aussi que les parents cessent de se crisper sur la question du sommeil. Tout d’abord parce que, d’un enfant Ă  l’autre, le besoin de dormir varie (entre huit et douze heures chez les 3-6 ans). C’est dire si les profils de dormeurs peuvent ĂȘtre variĂ©s ! “Comme les adultes, les enfants sont trĂšs diffĂ©rents”, rĂ©sume Rosa JovĂ©. Et la mĂ©decin de rappeler une Ă©vidence
 que nous, parents, avons souvent tendance Ă  oublier : le sommeil est un processus Ă©volutif et, comme d’autres apprentissages, il s’acquiert au fil du temps. “On dit aux enfants : “Tu marches comme un(e) grand(e), maintenant.” En revanche, on ne leur dit jamais : “Maintenant, tu dors comme un(e) grand(e)”, s’étonne la mĂ©decin. Alors que c’est ce que nous devrions faire !”

Évidemment, il y a toujours autour de nous ces enfants parfaits qui ont fait leurs nuits Ă  trois semaines, ne se relĂšvent jamais aprĂšs avoir Ă©tĂ© couchĂ©s et dorment jusqu’à 9 heures le samedi matin. Des exemples qui pĂšsent un peu lourd sur nos Ă©paules de parents fatiguĂ©s par des nuits hachĂ©es ou des rĂ©veils en fanfare le matin. Et aprĂšs ? D’abord, ces enfants ont-ils le sommeil aussi idyllique que leurs parents veulent bien le prĂ©tendre ? Ensuite, mĂȘme si, pour l’heure, le temps semble un peu long, n’oublions pas que, petit Ă  petit, les choses vont se mettre en place. Et, dans quelques annĂ©es, viendra le jour oĂč, aprĂšs des annĂ©es Ă  l’avoir suppliĂ© d’y rester, c’est vous qui demanderez Ă  votre enfant de sortir de son lit.

Petits soucis de sommeil : quelles solutions ?

  • Il ne veut pas dormir
    Tous les soirs, c’est la mĂȘme histoire : Corentin, 5 ans, n’arrive pas Ă  s’endormir. Bilan : c’est la java dans la chambre et le petit garçon dort rarement avant 22 heures.

Le point de vue de Marie-JosĂšphe Challamel, pĂ©diatre spĂ©cialiste du sommeil : D’un jour Ă  l’autre, il faut instaurer un rythme de coucher rĂ©gulier. Mieux vaut donc Ă©viter les couchers et levers tardifs le week-end. Ces deux jours oĂč l’enfant est dĂ©calĂ© suffisent Ă  perturber le rythme en semaine. Pour revenir progressivement Ă  une heure de coucher plus raisonnable, les parents peuvent la modifier tout doucement : 22 heures, puis, le week-end suivant 21h55, puis 21h50
 et ainsi de suite. Il importe Ă©galement d’associer la chambre au sommeil. Donc pas d’écrans, de jeux ou de piĂšce trop Ă©clairĂ©e avant de se coucher.

“Dors, je le veux !”, supplĂ©ment pour les parents, Pomme d'Api n°624, fĂ©vrier 2018. Texte : JosĂ©phine Lebard, illustrations : Jean-Louis Cornalba.

  • Il vient dans notre lit la nuit
    InĂšs, 6 ans, surgit souvent au milieu de la nuit pour s’installer entre ses parents dans leur grand lit. Faisant ainsi de leur chambre l’annexe de la sienne.

Le point de vue de la pĂ©diatre : À mon sens, il faut ĂȘtre constant et ramener Ă  chaque fois l’enfant dans son lit. MĂȘme si c’est fatigant pour le parent. On peut aussi motiver le petit en lui donnant un lot de 7 jetons en dĂ©but de semaine : une incursion nocturne dans le lit des parents Ă©quivaut Ă  rendre un jeton. Si, Ă  la fin de la semaine, l’enfant a conservĂ© tous ses jetons, on peut lui proposer quelque chose qui lui fait vraiment plaisir. Cette mĂ©thode fonctionne bien avec les 3-6 ans. Si, malgrĂ© tout, l’enfant continue Ă  venir dans le lit parental, il faut peut-ĂȘtre creuser : y aurait-il de l’anxiĂ©tĂ© dans ce comportement ? Si oui, pourquoi ?“Dors, je le veux !”, supplĂ©ment pour les parents, Pomme d'Api n°624, fĂ©vrier 2018. Texte : JosĂ©phine Lebard, illustrations : Jean-Louis Cornalba.

  • Il ne sait pas s’endormir seul
    Ava, 3 ans, connaĂźt d’impressionnantes crises de larmes si son papa ou sa maman ne reste pas Ă  ses cĂŽtĂ©s le temps qu’elle s’endorme. Et pas question de tenter de s’éclipser avant qu’elle ait fermĂ© les yeux


Le point de vue de la pĂ©diatre : Il convient de ne pas passer trop vite sur le rituel du coucher. L’enfant a besoin de temps et d’habitudes pour envisager le moment du lit. Alors, les parents doivent au minimum prendre dix bonnes minutes pour lire une histoire, faire le cĂąlin du soir. Et bien sĂ»r, prĂ©venir : “Je vais quitter la chambre avant que tu ne sois endormi.”

  • Il a des terreurs nocturnes
    Un cri dans la nuit : c’est celui qu’entendent rĂ©guliĂšrement les parents de Solal, 3 ans. Le petit garçon a souvent des terreurs nocturnes.

Le point de vue de la pĂ©diatre : Rappelons d’abord ce qu’est une terreur nocturne. Elle survient dans les trois premiĂšres heures, au cours de la phase de sommeil lent-profond. L’enfant hurle, les yeux grands ouverts. Souvent, il transpire. Cela arrive chez 15 % des petits environ. Inutile de le rĂ©veiller, mieux vaut le recoucher tranquillement. Souvent, ces terreurs nocturnes tĂ©moignent d’irrĂ©gularitĂ©s dans les rythmes, ou d’un manque de sommeil. On peut donc veiller Ă  ce que son enfant ait bien son compte de sommeil.

Parents Ă©puisĂ©s
 Comment rĂ©cupĂ©rer ?

Pas facile de tenir le coup au travail quand les nuits sont fractionnĂ©es et qu’on court aprĂšs le sommeil depuis des mois
 “Le problĂšme, estime Rosa JovĂ©, ce ne sont pas les enfants, mais les horaires en entreprises qui ne sont pas adaptĂ©s. Il faudrait de nouvelles lois qui rĂ©pondent Ă  ces besoins.” En les attendant, comment faire ?

Une sieste de vingt minutes en dĂ©but d’aprĂšs-midi peut permettre de rĂ©cupĂ©rer. De plus en plus d’entreprises proposent des espaces dĂ©diĂ©s au repos. On peut aussi alterner la gestion des problĂšmes nocturnes avec son conjoint et ainsi s’offrir une nuit complĂšte une fois sur deux.“Dors, je le veux !”, supplĂ©ment pour les parents, Pomme d'Api n°624, fĂ©vrier 2018. Texte : JosĂ©phine Lebard, illustrations : Jean-Louis Cornalba.

Enfin, dans la mesure du possible, on peut confier son petit aux parents ou aux beaux-parents et s’échapper pour un week-end. Cela permet de rĂ©cupĂ©rer, et cela fait aussi beaucoup de bien au couple parfois fragilisĂ© par la fatigue accumulĂ©e.

Pour aller plus loin

  • “Dormir sans larmes”, Rosa JovĂ©, Les ArĂšnes.
  • “Le sommeil, le rĂȘve et l’enfant”, Marie-JosĂšphe Challamel et Marie Thirion, Albin Michel.
  • Chaque mercredi, La Croix publie un supplĂ©ment Parents & enfants, un espace dĂ©diĂ© Ă  l’actualitĂ© de la famille et aux questions d’éducation. Vous trouverez un grand dossier “spĂ©cial sommeil” dans les Ă©ditions (papier et numĂ©rique) du mercredi 24 janvier.
“Dors, je le veux !”, supplĂ©ment pour les parents, Pomme d’Api n°624, fĂ©vrier 2018. Texte : JosĂ©phine Lebard, illustrations : Jean-Louis Cornalba.

“Dors, je le veux !”, supplĂ©ment pour les parents, Pomme d'Api n°624, fĂ©vrier 2018. Texte : JosĂ©phine Lebard, illustrations : Jean-Louis Cornalba.

“Ces Ă©crans trop attirants”, supplĂ©ment pour les parents, Pomme d'api, n°623. Texte d'Anne Bideault, illustrations de Mirjana Farkas.

Trop de temps devant les Ă©crans : que risquent les jeunes enfants ?

Tablette, smartphone, DVD, tĂ©lé  occupent les jeunes enfants, parfois des heures, sans jamais les lasser. Pour les professionnels de la petite enfance interrogĂ©s par le magazine Pomme d’Api, cette surexposition aux Ă©crans nuit au dĂ©veloppement des plus jeunes ! Explications, tĂ©moignages et conseils pour un bon usage en famille


Ces écrans trop attirants

“Ces Ă©crans trop attirants”, supplĂ©ment pour les parents, Pomme d'api, n°623. Texte d'Anne Bideault, illustrations de Mirjana Farkas.Il est 19 heures, on rentre tout juste de la garderie, de chez la nounou, du travail, et c’est le rush : un repas Ă  prĂ©parer, des enfants Ă©puisĂ©s Ă  laver, Ă  mettre en pyjama
 La tablette, le smartphone, le DVD, la tĂ©lĂ© ont ce pouvoir magique de les occuper en nous laissant les coudĂ©es franches. Comme il est tentant d’y recourir ! D’autant que ces Ă©crans ne semblent jamais les lasser. Si on leur donne le choix entre un puzzle en carton et un puzzle tactile, entre des Playmobil et un dessin animĂ©, entre la pĂąte Ă  sel et un petit jeu vidĂ©o, il y a fort Ă  parier que l’écran l’emportera. Normal, dĂ©cryptent les neuroscientifiques, notre cerveau adore ce qui est facile et ne demande pas ou peu d’efforts.

Pour autant, la plupart d’entre nous ont l’intuition qu’il ne faut pas abuser de ces Ă©crans si attractifs. D’ailleurs, il ne nous viendrait pas Ă  l’esprit de dire : “Les Lego, c’est vingt minutes, puis on arrĂȘte.” Que risquent donc de jeunes enfants Ă  passer trop de temps devant les Ă©crans ?

Les signaux d’alerte

Le tableau dĂ©peint par les professionnels est sombre. Florence Lerouge est orthophoniste depuis 1993. Ces derniĂšres annĂ©es, un phĂ©nomĂšne l’inquiĂšte : “Plus le temps passe, plus je reçois des enfants qui ne seraient pas arrivĂ©s chez moi s’ils avaient vĂ©cu ce qu’ils ont Ă  vivre : jouer, patouiller, crapahuter
 La vie d’un jeune enfant, quoi !”

À 3 ou 4 ans, quand des enfants passent plusieurs heures quotidiennes cumulĂ©es en compagnie d’un Ă©cran, ils ne parlent pas ou trĂšs peu (quelques mots, parfois en anglais, sans construction de phrases), ne regardent pas quand on leur parle, sont physiquement passifs. Pour rĂ©sumer son impression, elle utilise une expression glaçante : “ Ils sont en panne”.

Certes, les enfants qu’elle reçoit dans son cabinet reprĂ©sentent des cas extrĂȘmes, mais ils l’ont amenĂ©e Ă  fonder, avec deux collĂšgues, l’association “Joue, pense, parle” (lire ci-dessous) pour prĂ©venir les troubles du langage et du raisonnement, par le jeu. Elle a Ă©galement cosignĂ©, avec d’autres professionnels de la santĂ© et de la petite enfance, une tribune parue dans Le Monde en mai 2017, sous le titre : “La surexposition des jeunes enfants aux Ă©crans est un enjeu majeur de santĂ© publique”. Ces signataires entendent faire pression sur les autoritĂ©s publiques pour que les effets nocifs des Ă©crans soient mentionnĂ©s dans le carnet de santĂ©. “Ces Ă©crans trop attirants”, supplĂ©ment pour les parents, Pomme d'api, n°623. Texte d'Anne Bideault, illustrations de Mirjana Farkas.

Rappelons-le : pour que son cerveau se dĂ©veloppe, pour se prĂ©parer aux apprentissages scolaires, un jeune enfant doit explorer le monde avec tout son corps : bouger, goĂ»ter, tripoter, sentir le froid, le chaud, l’air, mesurer sa force physique, tester son Ă©quilibre
 Une palette extraordinaire que ne remplace pas la plus â€œĂ©ducative” des applis, sur la plus high-tech des tablettes. Le temps que les jeunes enfants passent devant ces appareils leur prend celui qui devrait ĂȘtre consacrĂ© aux activitĂ©s indispensables Ă  leur dĂ©veloppement cĂ©rĂ©bral et physique. Pour en convaincre les parents dubitatifs, Florence Lerouge les invite Ă  observer leur enfant jouer sur un Ă©cran. Qu’est-ce qui bouge ? Les yeux, ainsi qu’un ou deux doigts, sur un seul plan et quelques centimĂštres. À mettre dans la balance face aux potentialitĂ©s infinies de mouvements du corps humain !

Pour entrer dans le langage et dans la pensĂ©e, l’enfant doit aussi avoir des interactions avec son entourage. MĂȘme si une appli “parle”, elle ne remplace pas la richesse des Ă©changes humains.

Se déconnecter en famille

Heureusement, il est toujours temps d’aider les enfants Ă  dĂ©crocher des Ă©crans. Bien sĂ»r, quand les enfants y ont Ă©tĂ© fortement habituĂ©s, ĂŽter les Ă©crans ne va pas de soi et nĂ©cessite un “rĂ©engagement des parents”, explique Anne Lefebvre, psychologue clinicienne et prĂ©sidente d’Alerte (Association pour l’éducation Ă  la rĂ©duction du temps d’écran). Se rĂ©engager, c’est-Ă -dire : “S’installer sur le tapis avec eux, les accompagner dans le jardin ou au parc, apprendre Ă  faire des choses ensemble, comme les tĂąches mĂ©nagĂšres ou la cuisine
 Dire “va jouer avec ta sƓur” ne suffit pas !”

C’est aussi, explique Florence Lerouge, mĂ©nager du temps et un espace Ă  l’enfant pour le jeu, le laisser transformer, triturer, construire
 sans exiger que tout soit rangĂ© le soir. Il faut aussi rĂ©sister Ă  la tentation de tout faire Ă  leur place. En les habillant, en les chaussant, en les servant Ă  table etc., on ne les laisse pas dĂ©velopper leur attention, leur concentration, leur habiletĂ©.

Et les parents alors ?

Enfin, prenons aussi le temps de rĂ©flĂ©chir Ă  notre propre usage des Ă©crans. Anne Lefebvre dĂ©nonce aussi “l’indisponibilitĂ© parentale” : qui n’a pas interrompu une partie de dominos Ă  cause d’un SMS reçu ? Qui n’a pas dĂ©tournĂ© le regard devant la magnifique galipette de sa fille, en raison d’une alerte sur son Ă©cran ? Un parent dont les yeux sont rivĂ©s sur le smartphone peut ne pas percevoir les signaux de son jeune enfant. Cela entraĂźne chez ce dernier un sentiment d’insĂ©curitĂ©, et ne fait que rendre l’écran plus dĂ©sirable.

“La famille a besoin de temps de dĂ©connexion, conclut la psychologue. Il faut retrouver des temps communs dans notre vie contemporaine.” Alors, on fait quoi ce soir ? “Ces Ă©crans trop attirants”, supplĂ©ment pour les parents, Pomme d'api, n°623. Texte d'Anne Bideault, illustrations de Mirjana Farkas.

Du bon usage des écrans

Dans le meilleur des mondes possibles, le mieux serait de :
â€ș Proscrire tout Ă©cran avant 3 ans, mĂȘme la tĂ©lĂ©vision.
“Ces Ă©crans trop attirants”, supplĂ©ment pour les parents, Pomme d'api, n°623. Texte d'Anne Bideault, illustrations de Mirjana Farkas.â€ș Respecter la rĂšgle des “4 PAS” :
– PAS d’écran le matin,
– PAS d’écran dans la chambre de l’enfant,
– PAS d’écran pendant les repas,
– PAS d’écran avant de se coucher.

â€ș Ne pas dĂ©passer trente minutes par jour, jusqu’à 6 ans, en additionnant tous les Ă©crans (DVD, smartphone, tablette, TV, ordinateur), et de prĂ©fĂ©rence en s’asseyant avec eux.

D’autres conseils Ă  retrouver sur :

Le tĂ©moignage d’Alice, 38 ans : “Je pensais bien faire
”

“DĂšs ses 18 mois, j’ai mis une tablette dans les mains de notre fils. Je pensais bien faire, pour qu’il apprenne les couleurs, l’alphabet, les comptines
 Or, quand il est entrĂ© en petite section, il ne communiquait pas avec les autres, il ne s’est pas adaptĂ©. J’observais les autres enfants : de vrais moulins Ă  paroles pour certains ! Et le mien, ne parlant pas, toujours dans sa poussette, sans vouloir marcher. J’en ai pleurĂ©, je me suis dit : “J’ai loupĂ© un truc !”

La maĂźtresse m’a conseillĂ© l’orthophonie. Lors de la premiĂšre sĂ©ance, j’ai rempli un questionnaire sur notre vie quotidienne. Je me suis rendu compte que mon fils passait deux Ă  trois heures par jour devant la tablette. Selon l’orthophoniste, c’était ça le problĂšme. Je ne voulais pas y croire. Elle nous a invitĂ©s Ă  diminuer son temps d’écran en faisant d’autres choses avec lui Ă  la place. Au dĂ©but, ça a Ă©tĂ© horrible, il pleurait beaucoup pour avoir la tablette. C’était vraiment une addiction. On n’y est pas allĂ©s trop brutalement, mais on a regagnĂ© une forme d’autoritĂ©, en lui proposant d’autres choses. On s’est mis Ă  jouer avec lui, Ă  parler ensemble, Ă  faire du vĂ©lo, des sorties. Il avait Ă©galement une sĂ©ance d’orthophonie hebdomadaire.

En quelques semaines, il s’est “dĂ©pouponnĂ©â€ et il a fait de gros progrĂšs. “Il s’est transformĂ©, a dit la maĂźtresse, il est curieux de tout, il parle, il nous fait rire.” C’est sĂ»r, se passer des Ă©crans transforme la vie de famille. RĂ©cemment, nous sommes allĂ©s Ă  l’aquarium. Les enfants Ă©taient Ă©merveillĂ©s. Je me suis dit : “C’est ça la vie, en fait ! C’est simple !” J’avais voulu trop les gĂąter en achetant ordinateur, tablette, des choses inutiles Ă  leur Ăąge. Sa petite sƓur, qui n’a jamais Ă©tĂ© devant une tablette, n’arrĂȘte pas de parler !” “Ces Ă©crans trop attirants”, supplĂ©ment pour les parents, Pomme d'api, n°623. Texte d'Anne Bideault, illustrations de Mirjana Farkas.

Et chez vous, ça se passe comment ?

‱ “On est ferme, mais c’est pas Ă©vident
 Ça n’évite pas toujours les crises !”
‱ “Avant le dĂźner, avec la fatigue, ce sont des hurlements quand le DVD s’arrĂȘte !”
‱ “Quand la tablette est tombĂ©e en panne, nous ne l’avons pas remplacĂ©e. Depuis, l’ambiance est beaucoup plus sereine le soir !”

Vos astuces de parents

“Ces Ă©crans trop attirants”, supplĂ©ment pour les parents, Pomme d'api, n°623. Texte d'Anne Bideault, illustrations de Mirjana Farkas.‱ “J’utilise le replay : Ă  la fin du programme choisi par mon fils, “ça s’arrĂȘte”. Je trouve ça plus facile Ă  gĂ©rer que de mettre une chaĂźne.”
‱ “Je les avertis un peu avant, histoire de ne pas les “surprendre” quand j’éteins.” ‱ “Nous avons confectionnĂ© des “tickets de cinĂ©ma”. Ma fille de 4 ans en a quatre par semaine, pour vingt minutes de DVD. Quand elle les a tous utilisĂ©s, elle doit attendre la semaine suivante.”
‱ “J’utilise un minuteur. Quand ça sonne, on Ă©teint.”
‱ “Je prĂ©viens toujours : cet Ă©pisode-lĂ , c’est le dernier.”

“Ces Ă©crans trop attirants”, supplĂ©ment pour les parents, Pomme d'api, n°623. Texte d'Anne Bideault, illustrations de Mirjana Farkas.

“Ces Ă©crans trop attirants”, supplĂ©ment pour les parents, Pomme d’api, n° 623. Texte d’Anne Bideault, illustrations de Mirjana Farkas.
“Montessori pour les nuls - Petit traitĂ© de pĂ©dagogie”, supplĂ©ment pour les parents, Pomme d’Api, octobre 2017. Texte : JosĂ©phine Lebard. Illustrations : Zelda Zonk.

Montessori : petit traitĂ© de pĂ©dagogie avec Pomme d’Api

L’esprit de Maria Montessori souffle sur Pomme d’Api depuis sa crĂ©ation, il y a plus de 50 ans. Le supplĂ©ment pour les parents du numĂ©ro d’octobre lui consacre son dossier et fait le point sur la “mĂ©thode Montessori”
 dont on parle beaucoup sans toujours savoir prĂ©cisĂ©ment en quoi elle consiste !

Montessoqui ? Montessoquoi ? Montessori !

Comment le nom d’une Italienne, mĂ©decin et pĂ©dagogue, disparue au dĂ©but des annĂ©es 1950, se retrouve-t-il sur les lĂšvres de nombreux parents du XXIe siĂšcle ? Car Maria Montessori et sa fameuse mĂ©thode semblent prĂ©sentes partout : des Ă©coles qui portent son nom aux tables des librairies qui regorgent d’ouvrages, en passant par les rayons des magasins qui proposent son matĂ©riel
 Impossible, quand on est jeune parent, d’échapper au phĂ©nomĂšne. “Montessori pour les nuls - Petit traitĂ© de pĂ©dagogie”, supplĂ©ment pour les parents, Pomme d’Api, octobre 2017. Texte : JosĂ©phine Lebard. Illustrations : Zelda Zonk.

“Depuis une dizaine d’annĂ©es, dans l’esprit de beaucoup de parents, Maria Montessori apparaĂźt comme une promesse de mieux”, estime notre collaboratrice Anne Bideault, Ă©galement rĂ©dactrice en chef de “L’enfant et la vie”, journal fondĂ© en 1969 pour faire connaĂźtre la pensĂ©e Montessori en France. Mais cette promesse demeure souvent floue. “Par la force des choses, Ă  la tĂ©lĂ©vision, dans les journaux, je vois passer beaucoup de contenus sur Montessori, reconnaĂźt Alix, maman de Marceau, 3 ans, et Camille, 1 an. Mais de lĂ  Ă  dĂ©finir clairement de quoi il retourne
 Pour moi, il s’agit de permettre Ă  son enfant de dĂ©velopper son autonomie, non ?”

Alix a tout bon. En effet, l’engouement suscitĂ© par Montessori a parfois un peu dĂ©voyĂ© son propos. “Certains en parlent aujourd’hui en termes de performance, regrette Anne Bideault. Savoir lire Ă  5 ans, compter Ă  4 ans et demi
 Alors que Maria Montessori parle Ă©panouissement personnel, capacitĂ© de l’enfant Ă  devenir lui-mĂȘme, avec, comme grand projet sous-tendu, l’idĂ©e d’éduquer Ă  la paix et au vivre-ensemble.” Pour ce faire, Maria Montessori part d’un constat de son Ă©poque : l’enfant est opprimĂ© par un adulte plus fort que lui, qui dispose de lui et le contraint Ă  s’adapter Ă  son environnement. Une soumission, dĂ©plore-t-elle, “qui conduit Ă  la nĂ©gation de (sa) personnalitĂ©â€.

Il va donc s’agir de tout rĂ©volutionner Ă  la maison pour lui rendre toute sa place d’ĂȘtre humain Ă  part entiĂšre. “Montessori considĂšre que l’enfant nous montre, Ă  nous Ă©ducateurs, ce dont il a besoin”, rĂ©sume Charlotte Poussin, Ă©ducatrice Montessori, traductrice de son Ɠuvre et membre du conseil d’administration de l’Association Montessori de France (AMF). “À nous d’élaborer un cadre adaptĂ©, structurant, dans lequel l’enfant sera le plus libre possible.”“Montessori pour les nuls - Petit traitĂ© de pĂ©dagogie”, supplĂ©ment pour les parents, Pomme d’Api, octobre 2017. Texte : JosĂ©phine Lebard. Illustrations : Zelda Zonk.
Bien entendu, il n’est pas question – comme le souligne avec malice Charlotte Poussin – “de regarder tranquillement son enfant dĂ©couper les rideaux du salon”. Mais de favoriser un intĂ©rieur oĂč le petit pourra agir au maximum en autonomie (lire ci-dessous : “Vous faites du Montessori sans le savoir !”), en l’impliquant dans la vie quotidienne du foyer pour qu’il apprenne en faisant. Un environnement chaleureux, mais pas aseptisĂ©, Ă  l’instar des “Maisons des enfants” fondĂ©es par la pĂ©diatre : le verre en vrai verre, les meubles qui font du bruit quand on les dĂ©place
 affinent sa maĂźtrise des mouvements et constituent autant d’expĂ©riences fondatrices.

Quant Ă  nous, adultes, mieux vaut ĂȘtre dans une logique de proposition plutĂŽt que dans une logique d’imposition. Ce qui ne reprĂ©sente pas la moindre des difficultĂ©s : “Nous avons tendance Ă  ĂȘtre trop interventionnistes avec nos enfants, note Anne Bideault. Avec Montessori, il nous faut apprendre Ă  nous tenir en retrait, Ă  accepter de perdre du temps pour laisser notre petit faire les choses Ă  son rythme.” À nous de trouver notre “seuil d’intervention”, comme le nomme Maria Montessori : “L’adulte doit dire et faire ce qui est nĂ©cessaire pour permettre Ă  l’enfant d’agir seul utilement.”
Plus qu’une pĂ©dagogie uniquement tournĂ©e vers l’enfant, la mĂ©thode Montessori implique de vrais bouleversements dans les fonctionnements parentaux. C’est aussi ce qui la rend si passionnante : si le petit s’enrichit en faisant par lui-mĂȘme, l’adulte gagne Ă  lui concevoir ce cadre bienveillant. “Nous avons tous tendance Ă  nous endormir sur les choses, Ă©crit Maria Montessori, et il nous faut un ĂȘtre nouveau qui nous rĂ©veille et nous garde Ă©veillĂ©s [
], un ĂȘtre qui agit diffĂ©remment de nous et qui chaque matin nous dit : “Regarde, il y a une autre vie, vis mieux!” Alors, prĂȘts Ă  vous lancer ?

Vous faites du Montessori sans le savoir !

MĂȘme si vous ne vous ĂȘtes pas plongĂ© dans les ouvrages Ă©crits par Maria Montessori, vous avez dĂ©jĂ  fait du Montessori. La preuve par 10 (gestes et attitudes).

‱Le jour oĂč vous avez proposĂ© Ă  votre enfant un petit marchepied pour lui permettre d’atteindre sans difficultĂ©s l’évier de la cuisine ou le lavabo.
‱Le jour oĂč vous avez installĂ© une patĂšre Ă  sa hauteur pour qu’il puisse accrocher lui-mĂȘme son manteau.
‱Le jour oĂč vous avez dĂ©cidĂ© d’arrĂȘter de ponctuer vos phrases de “Vite, vite !” et autres “DĂ©pĂȘche-toi !” agacĂ©s, conscient qu’il faut laisser votre enfant agir Ă  son rythme.
‱Le jour oĂč vous avez installĂ© dans sa chambre des espaces de rangement Ă  sa hauteur : penderie basse, Ă©tagĂšre basse
et petit casier pour ses chaussures et ses chaussons.
‱Le jour oĂč vous avez installĂ© un lit bas dans sa chambre : une façon de lui permettre d’aller se reposer quand il est fatiguĂ©, et de gagner en autonomie le matin ou Ă  la fin de sa sieste.
‱Le jour oĂč vous lui avez confiĂ© la tĂąche de couper un lĂ©gume avec un vrai petit couteau, sous votre surveillance, au moment de prĂ©parer le repas.
‱Le jour oĂč vous avez dĂ©cidĂ© de remplacer le gobelet en plastique par un vrai verre, lors de ses repas.
‱Le jour oĂč vous lui avez donnĂ© un tablier, un petit balai, un joli chiffon colorĂ© pour lui confier de menues tĂąches mĂ©nagĂšres.
‱Le jour oĂč vous avez optĂ© pour une garde-robe – vĂȘtements comme chaussures – facile Ă  mettre afin de permettre Ă  votre enfant de s’habiller de façon autonome.
‱Le jour oĂč vous l’avez incitĂ© Ă  faire un choix – entre deux desserts par exemple – pour Ă©duquer sa capacitĂ© Ă  choisir.

Jeux Montessori
 comment choisir ?

En matiĂšre de matĂ©riel Montessori, l’offre est plĂ©thorique. De Nature et DĂ©couvertes Ă  Oxybul, les grandes enseignes se sont engouffrĂ©es dans la brĂšche pour proposer des jeux. D’accord, c’est tentant, mais comment faire le tri ? D’autant que le nom “Montessori” peut ĂȘtre utilisĂ© par qui le souhaite, car il n’y a ni label, ni marque dĂ©posĂ©e
Plusieurs critĂšres peuvent permettre d’opĂ©rer une sĂ©lection.

‱ Le jeu doit traiter d’une seule chose à la fois.
Des cubes de tailles variĂ©es qui reprĂ©senteraient chacun une partie de puzzle, ou des lettres rugueuses ornĂ©es de flĂšches mobilisent trop de facultĂ©s diffĂ©rentes pour l’enfant, censĂ© se concentrer sur une tĂąche.
‱ L’esthĂ©tique importe aussi car, comme le souligne elle-mĂȘme Maria Montessori dans ses Ă©crits, “la beautĂ© invite Ă  l’activitĂ©â€.
‱ Le parent, avant d’offrir le jeu, doit l’avoir manipulĂ© auparavant, afin d’en maĂźtriser le fonctionnement et d’en proposer une dĂ©monstration. Mieux vaut s’ĂȘtre entraĂźnĂ© avant, surtout si l’activitĂ© est complexe, et vĂ©rifier que le jeu est fourni avec un livret explicatif !
‱ Enfin, ne surtout pas oublier qu’on “prĂ©sente” le jeu Ă  l’enfant, on ne le lui impose pas. À lui de dĂ©cider du bon moment pour s’en emparer. À nous de le laisser faire sans nous montrer trop interventionnistes.

“Montessori pour les nuls - Petit traitĂ© de pĂ©dagogie”, supplĂ©ment pour les parents, Pomme d’Api, octobre 2017. Texte : JosĂ©phine Lebard. Illustrations : Zelda Zonk.

Petite biblio Montessori

Voici une sĂ©lection de livres pour se plonger dans l’univers Montessori.

‱L’enfant dans la famille, Maria Montessori, Éditions DesclĂ©e de Brouwer, 17,90 €.
Une trĂšs bonne porte d’entrĂ©e dans l’univers de Maria Montessori. Dans ce recueil thĂ©matique – “De ma mĂ©thode en gĂ©nĂ©ral”, “L’environnement de l’enfant” – elle explique de façon limpide les grands principes de sa pensĂ©e.“Montessori pour les nuls - Petit traitĂ© de pĂ©dagogie”, supplĂ©ment pour les parents, Pomme d’Api, octobre 2017. Texte : JosĂ©phine Lebard. Illustrations : Zelda Zonk.
‱L’enfant est l’avenir de l’homme, Maria Montessori, Éditions DesclĂ©e de Brouwer, 19,90 €.
Cet ouvrage inĂ©dit prĂ©sente une sĂ©rie de cours que Maria Montessori a donnĂ©s en 1946. Un propos clair et visionnaire sur l’enfant et l’éducation.
‱Apprends-moi Ă  faire seul – La pĂ©dagogie Montessori expliquĂ©e aux parents, Charlotte Poussin, Éditions Eyrolles, 16,90 €.
Fine connaisseuse de l’Ɠuvre de Maria Montessori qu’elle a notamment traduite, Charlotte Poussin propose un ouvrage qui se concentre sur les 3-6 ans, Ă  l’école comme Ă  la maison.

Quelques citations


‱“Il nous faut apprendre Ă  nous maĂźtriser, nous tenir Ă  l’écart, suivre l’enfant presque Ă  distance, sans le fatiguer avec notre intervention, mais sans pour autant jamais l’abandonner.”
‱“Il faut permettre à l’enfant de participer à notre vie.”
‱“L’adulte qui n’a pas encore considĂ©rĂ© l’activitĂ© de la main enfantine comme un besoin vital [
] empĂȘche l’enfant de travailler [
]. La main permet Ă  l’intelligence de se manifester.” Maria Montessori

“Montessori pour les nuls – Petit traitĂ© de pĂ©dagogie”, supplĂ©ment pour les parents, Pomme d’Api, octobre 2017. Texte : JosĂ©phine Lebard. Illustrations : Zelda Zonk.